Saloon

 

Au moment où le soir prenait effet, Joe Peligros poussa plus que nécessaire la double porte du saloon qui faisait des triples va-vient-va ; whisky ! ordonna-t-il accoudé au bar ; whisky ! ordonna le patron à l'apprenti ; quand Joe ingurgitait son breuvage d'un seul coup, un coup sonna ; devant lui, Chico Dingo arrivait dans le miroir, tirant en l'air juste pour s'amuser, en ouvrant en même temps la double porte, quelle brute, d'un coup de pied ; va-vient-va faisait excessivement la porte brutalisée ; accoudé au même bar, Chico ordonna : whisky ! et whisky ! ordonna le patron à l'apprenti ; le whisky se laissa ingurgiter d'un seul coup ; dehors, le train sifflait ; aux tables, on faisait des parties de cartes et des nuages de fumée en volutes compliquées ; au milieu de ces messieurs, des filles avec des fleurs dans les cheveux détournèrent leurs sourires plutôt vers Chico et vers Joe, qui entre eux se regardaient d'un air mauvais ; une chaise s'est mise à voler qui vint se contempler dans le miroir ; crash ! et tout le monde s’entremêla : ceux des tables et ceux du bar et le patron et l'apprenti et la fumée et les filles avec des fleurs dans les cheveux et le pianiste, car il y en avait un pour le piano qui jouait faux ; pas un seul shérif et à nouveau tire en l'air Chico, juste pour s'amuser ; comme Joe l'aime décidément de moins en moins, de plus en plus je crains un duel ; le piano joue tout seul et la porte va-vient-va toute seule bat sans fin célébrant la pagaille qui va bon train, et le train, je ne sais pas, dans le vacarme, s'il sifflait.

 

février 2015

 

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